Qu'est-ce que la vie ?

Préambule

Il y a eu, au cours de l'histoire, de multiples tentatives pour essayer de définir la vie, ou au moins, en extraire les caractéristiques, les propriétés essentielles. Pourtant, aujourd'hui, le consensus en matière de définition de la vie c'est qu'il n'y a pas de consensus1 . Certains argumentent même qu'il est inutile de rechercher cette définition2. Je pense au contraire que les scientifiques et philosophes devraient persévérer dans cette voie au fil des découvertes et avancées en biologie. S'amuser à rechercher une définition / des caractéristiques essentielles de la vie est un petit jeu sans prétention mais formateur pour l'esprit. Et cela influence forcement, de prés ou de loin, la manière d'envisager, de penser et d'élaborer des expériences. Michel Morange va encore plus loin, il écrit:

"Une telle absence de curiosité de la part de la majorité des biologistes n'est pas gênante à court terme. On peut faire un très bon travail de biologie sans s'interroger sur ce qu'est la vie. A long terme, elle est probablement plus dommageable: elle est la marque d'une certaine paupérisation intellectuelle du milieu scientifique, préjudiciable à sa créativité " 3

A quoi pourrait bien servir une définition de la vie ?

Cette définition pourrait avoir des applications directes dans le domaine de la vie artificielle. En effet, à partir de quand devra-t-on considérer que tel robot, tel programme informatique est vivant ? Sur quel critère se baser ? L'automate "canard de Vaucanson" est-il vivant ? Non assurément mais qu'en est il des robots tortues de William Grey Walter ? Et les cellules du jeu de la vie de John Conway ou les fourmis de Chris Langton? Y aura-t-il un jour où le plus sceptique des sceptiques n'arrivera plus à distinguer ces programmes d'un organisme vivant ?

Cette définition nous aiderait aussi en biologie synthétique. En effet, certaines équipes essaient de recréer des cellules de novo: on parle de "protocellules" (vésicule lipidique contenant des molécules biologiques et capable d'exprimer des gènes). A partir de quand devra-t-on considérer ces "protocellules" comme des cellules vivantes ? Certains travaillent déjà à cette question et il a été proposé qu'une cellule artificielle devrait être considérée "vivante" à partir du moment où de vraies cellules n'arrivent plus à la distinguer d'une cellule normale.

Enfin cette définition de la vie nous aiderait en exobiologie (astrobiologie) pour rechercher la vie extraterrestre sous quelque forme que ce soit. Cette discipline a besoin de savoir quelles sont les caractéristiques de la vie pour décider ce qu'il faut rechercher et donc quel type d'instrument construire. Notez d'ailleurs que la recherche de vie extra-terrestre part souvent du postulat d'une vie basée sur le carbone ou l'oxygène. Une nouvelle discipline, la xénobiologie, essaie de dépasser cette limitation anthropocentrique appelée "chauvinisme du carbone" en développant de nouvelles hypothèses plus audacieuses sur ce que pourraient être des formes alternatives de vie extra-terrestre.

On voit donc que la recherche de la définition de la vie a de nombreuses applications immédiates. Je précise, même si cela est évident, que cette définition a également des conséquences morales (et donc politiques) que j'ai volontairement éludées ici.

Je vais donc me lancer dans l'étude des caractéristiques et définitions de la vie. Je me sens autorisé à cette étude car derrière le fonctionnement d'un réseau de régulation intracellulaire se cache le dogme/l'hypothèse de l'émergence de la vie. Il me faut donc en savoir un peu plus sur cette dernière. Mon plan sera découpé en 4 parties.

Dans la première partie, je "listerai" l'ensemble des vues / caractéristiques / définitions de la vie avec pour but une relative exhaustivité (beaux antonymes!). Ces vues / définitions / caractéristiques, je les ai puisées et notées au fur et à mesure de mes lectures chez un certain nombre d'auteurs et elles sont retranscrites parfois de manière exacte et parfois en substance4 . Dans la seconde partie, j'opérerai un virage métaphysique (déjà bien entamé). Dans la troisième partie, je proposerai un angle de vue personnel (une spéculation/une construction cognitive faisable) sur la question "qu'est-ce que la vie ?". Enfin, la dernière partie abordera la grande oubliée à savoir la mort sous un regard philosophique.

La vie perçue d'un point de vue scientifique

A défaut de disposer d'une définition totalement consensuelle, il existe tout de même un consensus sur les propriétés ci-dessous:

Un organisme vivant:

Voici un petit nuage de tags de synthèse sur la vie:

métabolisme -- flux -- energie -- homéostasie -- temps -- espace -- erreur -- stabilité -- frontière -- ordre -- chaos -- transition de phase -- matière -- information -- programme -- code -- complexité -- interaction -- réseau -- reproduction -- évolution -- adaptation -- milieu

J'espère que le lecteur aura pu puiser dans cette synthèse ce qu'il est venu y chercher, peut-être une certaine inspiration ou un simple éclaircissement.

La vie perçue d'un point de vue philosophique

Il me vient ici à l'esprit principalement deux thèmes à développer mais cela n'est absolument pas exhaustif. Il s'agit des notions de téléologie et de volonté de puissance.

La téléologie

La vie a-t-elle une finalité, un but, un projet que nous n'aurions pas encore découvert ?

Beaucoup de gens pensent que justement la vie se définit par son absence de finalité et j'avoue que je reconnais un charme certain à cette manière d'envisager les choses. Mais cela nous arrange bien, nous scientifiques, car la méthode scientifique nous interdit formellement le recours à la téléologie en biologie: c'est-à-dire l'explication des phénomènes vivants en termes de but. Ainsi, selon une boutade de François Jacob "longtemps le biologiste s'est trouvé devant la téléologie comme auprès d'une femme dont il ne peut pas se passer mais en compagnie de qui il ne veut pas être vu en public ". Et Jacques Monod remarque bien le problème profond que cela pose. Il propose le terme de téléonomie (concept scientifique de téléologie) c'est-à-dire la qualité de la matière vivante en tant qu'elle matérialise un projet.

"L'objectivité cependant nous oblige à reconnaître le caractère téléonomique des êtres vivants, à admettre que dans leurs structures et performances, ils réalisent et poursuivent un projet. Il y a donc là, au moins en apparence, une contradiction épistémologique profonde. Le problème central de la biologie, c'est cette contradiction elle-même, qu'il s'agit de résoudre si elle n'est qu'apparente, ou de prouver radicalement insoluble si en vérité il en est bien ainsi." 5

Ainsi, il nous est interdit de penser, en biologie, en termes de finalité et je ne suis pas sûr que l'on ait le droit de penser en termes de fonction. Car tout de suite on est accusé soit de faire des anthropocentrismes grossiers, soit de faire de la métaphysique. Voyons des exemples pour être plus clair.

Une enzyme convertit un substrat en produit. Nous n'avons pas le droit de dire que la finalité de l'enzyme est de convertir tel substrat en tel produit ni d'ailleurs que la fonction de l'enzyme est de convertir tel substrat en tel produit. A cause (ou grâce) à la théorie de l'évolution, une enzyme n'a pas de but et n'a pas de fonction. Les buts et les fonctions sont réservés aux hommes et aux dieux.

Or je suspecte que certains anthropocentrismes cachent (et donc contiennent) plus qu'un simple biais cognitif sans intérêt. Ce n'est pas un hasard si nous, pauvres biologistes humains, voulons et aimons attribuer une finalité à une enzyme (il fallait absolument pouvoir utiliser le lactose comme source d'énergie), attribuer une finalité au lymphocyte T (il fallait absolument se défendre contre cette bactérie pathogène), à la peau (il fallait absolument disposer d'une barrière imperméable et protectrice), à l'aile (la fonction/finalité d'une aile c'est de voler). Or si nous pouvons attribuer une finalité, une fonction à tous les constituants biologiques (molécules, cellules, organes) en dessous de notre échelle, et quand bien même cette finalité est "une vue de l'esprit" à cause de la théorie de l'évolution, peut-on imaginer que l'organisme entier et même la biosphère entière dispose aussi (tout comme les niveaux inférieurs) d'une finalité "vue de l'esprit" (qu'importe qu'elle soit un anthropocentrisme !) ? Finalité qui ne nous sauterait pas aux yeux car nous en serions un maillon ?

J'aime bien la métaphore de la montre: celle-ci connaît (pourrait connaître) son mécanisme parfaitement, elle ne connaitra jamais sa finalité: donner l'heure à l'homme. Le même type de parallèle peut-il être appliqué à l'homme qui, dans le futur peut être, connaitra sur le bout des doigts son fonctionnement sans jamais être en mesure de connaître son but ?

Quel pourrait être le but, le projet, la finalité de tel ou tel organisme?

Quel pourrait être le but, le projet, la finalité de la biosphère entière?

Et si la finalité de tout organisme, de la biosphère était "la puissance" ?

La volonté de puissance

Selon Nietzsche, la vie se définit par la "volonté de puissance":

"Partout où j'ai trouvé quelque chose de vivant, j'ai trouvé de la volonté de puissance ; et même dans la volonté de celui qui obéit j'ai trouvé la volonté d'être maître. [...] Et la vie elle-même m'a confié ce secret: "Voici, m'a-t-elle dit, je suis ce qui doit toujours se surmonter soi-même". [...] Il n'a assurément pas rencontré la vérité, celui qui parlait de la "volonté de vie" , cette volonté n'existe pas. Car: ce qui n'est pas ne peut pas vouloir ; mais comment ce qui est dans la vie pourrait-il encore désirer la vie ! Ce n'est que là où il y a de la vie qu'il y a de la volonté: pourtant ce n'est pas la volonté de vie, mais --- ce que j'enseigne --- la volonté de puissance." 6

La vie doit exploiter un potentiel :

"vivre c'est essentiellement dépouiller, blesser, dominer ce qui est étranger et plus faible, l'opprimer, lui imposer durement sa propre forme, l'englober et au moins au mieux l'exploiter. [...] L'exploitation n'est pas le propre d'une société vicieuse ou d'une société imparfaite et primitive: elle est inhérente à la vie dont elle constitue une fonction primordiale, elle découle très exactement de la volonté de puissance, qui est la volonté de vie " 7

"C'est un fait que nous-mêmes croissons, changeons continuellement, rejetons nos vieilles écorces, muons à chaque printemps, ne cessons de devenir plus jeunes, plus à venir, plus hauts, plus forts, enfonçons toujours plus vigoureusement nos racines dans les profondeurs [Le potentiel dont je parle] ---dans le mal--- tout en embrassant simultanément le ciel toujours plus amoureusement, plus largement, et en aspirant toujours plus avidement en nous sa lumière, de toutes nos branches et de toutes nos feuilles. Nous croissons comme des arbres ---cela est difficile à comprendre comme toute vie !--- [...] tel est notre sort, comme on l'a dit: nous croissons en hauteur [...] la fatalité de notre hauteur, notre fatalité." 8

La finalité (anthropocentrique) d'un organisme ou de la biosphère pourrait-il être la puissance ? Mais alors que serait cette puissance ? Comment définir cette puissance que rechercherait la vie ? Il est temps maintenant de passer à mon "essai" (au sens de tentative) pour définir la vie. Je le répète: il ne s'agira que de simples spéculations/constructions cognitives inoffensives. Je ne prétends rien démontrer.

La conjecture des exemplaires

Certains scientifiques cherchent "le génome minimal" c'est-à-dire l'ensemble minimum de gènes (par exemple 250 gènes) permettant à un organisme (une bactérie) de se reproduire de manière autonome. Michel Morange parle de manière humoristique de PGCD (le plus grand commun diviseur) de la vie. Il voit aussi que ce projet ne nous aidera probablement pas dans la quête à la définition de la vie car "rechercher l'organisme vivant le plus simple est peut être aussi vain qu'essayer de trouver le plus petit parmi les géants" 9. Selon Morange, "l'erreur c'est de chercher aux états limites et de chercher à définir la vie a partir d'un seul organisme isolé alors qu'il faut regarder l'écosystème tout entier". En effet, "un être vivant ne peux survivre que parce qu'il utilise le travail effectué par d'autre. [...][C'est une] vision globale écologique de la vie" 10.

Prenons un exemple, on peut enlever, par des méthodes de génie génétique, les gènes de biosynthèse des bases chez E. coli. Celle-ci ne pourra alors plus fabriquer les fameuses bases A, T, C, G nécessaires à la réplication et à la transcription. Par conséquent, elle ne pourra plus "vivre" sauf si on rajoute ces bases dans le milieu de culture (ce qui s'appelle une complémentation). Ce sont donc les gènes fantômes de l'organisme qui a produit les bases, récupérées par l'industriel qui nous les vend sous forme de poudre, qui permettent à notre souche d'E. Coli "OGM" de vivre. De même que les gènes fantômes des végétaux (qui rejettent notre si précieux oxygène dans l'atmosphère et nous fournissent les molécules organiques de notre alimentation) sont indispensables à la vie de l'humanité et donc complètent son génome.

Toute cette démonstration pour en arriver à un point. Il faut selon moi dissocier la définition de l'organisme de la définition de la vie. Ce sont deux choses différentes11. On peut définir un organisme avec la faculté de reproduction, d'évolution, la présence d'un métabolisme. Ce sont nos organismes bien connus sur terre. On peut, à souhait, adapter la définition pour inclure ou exclure telle ou telle entité (virus, prion, robot...). Pour ce qui est de définir la vie, je propose de procéder différemment. Il faut regarder dans un endroit où il n'y en a pas (la planète Mars) et regarder précisément ce qu'il n'y a pas. Regardez la photo ci-dessous. Que manque-t-il?

Sol jonché de rochers volcaniques vu par Mars Pathfinder
Figure 1. Sol jonché de rochers volcaniques vu par Mars Pathfinder le 8 septembre 1999 (Article Wikipedia: Mars ; image de la NASA)

Sur Mars, il n'y a pas de molécules trop complexes: Parmi les molécules les plus grosses, on trouve la serpentine ((Mg,Fe)3Si2O5(OH)4) ou le talc (Mg3Si4O10(OH)2)) qui contiennent tout au plus une trentaine d'atomes12. Jusqu'ici, rien de nouveau: on sait bien qu'une des caractéristiques de la vie c'est sa capacité à fabriquer et posséder des molécules énormes: l'ADN de l'homme, une des plus grandes molécules sur terre, fait 3.2 milliards de nucléotides et chaque nucléotide contient au moins une quarantaine d'atomes soit une molécule de l'ordre de 100 milliards d'atomes.

J'aimerais maintenant que l'on "switch" en mode "information". C'est-à-dire que l'on passe des molécules aux bits. Je ne connais pas vraiment de méthode: c'est un switch purement conceptuel et donc critiquable. J'avoue ne pas savoir si cela est réellement possible car, comme le dit René Thom "on n'échappe pas au continu"13. Admettons qu'à la molécule la plus complexe sur Mars (30 atomes) correspondent approximativement 30 bits. Et à la molécule la plus complexe (sur terre), un simple brin d'ADN humain de 100 milliards d'atomes, correspondent approximativement 100 milliards de bits.

Ma molécule de 30 atomes sur Mars est donc transformée en une chaine de trente 0 et 1, les uns à la suite des autres. Cette suite de 0 et 1, je l'appellerai séquence dans la suite de mon exposé et elle n'aura rien à voir avec une séquence ADN. Voici par exemple une séquence de 30 bits:

011000110011101010010100010100

Pour le simple brin d'ADN humain, on aurait une séquence de 100 milliards de bits ce qui tiendrait tout juste sur mon disque dur externe.

Maintenant, opérons la même transformation conceptuelle pour Mars qui devient une séquence de 0 et de 1. Cette séquence contient toute l'information contenue dans Mars. Appelons cette séquence S. S est gigantesque car elle contient la description de chacune des molécules, leurs positions, les interactions: absolument tout ce qui est nécessaire pour décrire Mars exactement.

Ma conjecture est la suivante: Seule la vie est capable de créer des exemplaires d'une taille bien supérieure à ce que peut créer le hasard.

Ce qu'on ne trouve pas sur Mars, c'est-à-dire dans la séquence S (en bit), c'est une séquence P apériodique (en bits) au moins supérieure au logarithme de S (multiplié par une constante) en au moins deux exemplaires.

Donc, si quelqu'un trouvait dans la séquence S (Mars), deux séquences apériodiques P identiques (deux exemplaires de P) tel que taille(P)>log(taille(S)) x constante alors P serait une preuve de l'existence passée ou présente de vie sur Mars. P serait une trace de vie.

La conjecture des exemplaires.
Figure 2. La conjecture des exemplaires.

Je sens mon lecteur un petit peu circonspect. Derrière ces phrases d'apparence un peu barbare se cache quelque chose de relativement simple. J'ai écrit un petit script Matlab qui crée une séquence aléatoire S de 0 et de 1 d'une certaine taille par exemple 100 bits (c'est-à-dire cent 0 et 1). Puis le script recherche la séquence la plus longue P que l'on trouve en 2 exemplaires dans S. Au fur et à mesure, le script augmente la taille de S et regarde comment évolue la taille de P en fonction de S. Quand S augmente, P augmente de moins en moins vite et il semble que ce soit une fonction logarithme qui "fit" correctement les données de la simulation (à une constante prés). En fait, si la séquence S (Mars) faisait 1080 bits (le nombre d'atomes dans l'univers connu), la séquence P la plus longue présente en deux exemplaires serait d'à peine 184 bits soit log(1080).

Ainsi, si l'on trouvait sur cette planète mars (et sa version conceptuelle de 1080 bits), au moins deux molécules identiques de quelques centaines d'atomes (quelques centaines de bits), alors, selon ma conjecture, on serait en présence d'une preuve de l'existence passée ou présente de vie.

Sur la graphique de la figure 3, on voit que la présence de la constante sert à s'éloigner vers le haut des données expérimentales (en bleu) qui représentent la taille maximale la plus probable de la séquence P (en deux exemplaires) dans une séquence S aléatoire. En s'éloignant vers le haut (en augmentant P), on fait chuter très vite la probabilité de trouver par hasard ces deux exemplaires. On peut donc définir une ligne de vie arbitraire au delà de laquelle trouver deux exemplaires ne peut être dû au hasard qu'avec une probabilité infime et est, bien plus probablement, une trace de vie passée ou présente.

Le logarithme semble intervenir dans la conjecture des exemplaires
Figure 3. Le logarithme semble intervenir dans la conjecture des exemplaires.
Cliquer pour voir le code Matlab
                
% Demonstration que le nombre d exemplaires d une sequence P appartenant
% à une sequence aleatoire S est proportionnelle au logarithme

% Ce script gènere une Sequence S aleatoire (symbolisant Mars) et cherche
% quelle est la taille maximal d'une sequence P appartenant à S tel que P
% est au moins en deux exemplaires dans S.
clear all
iteration=0;
% boucle qui test differentes tailles de S
for TailleS=[10:10:150 200:100:1000]
    
    % choisit un Sequence binaire aleatoire et la convertit en "string"
    S=num2str(round(rand(1,TailleS)));
    S=S(isspace(S)==0);% Supprime les espaces dans la sequence
    
    for    TailleP=1:TailleS % parcourt toute les tailles de P
        for DepartP=1:TailleS-TailleP %parcourt tout les departs de P
            
            P=S(DepartP:DepartP+TailleP);% Sequence P qui appartient à S
            % cherche le nombre de fois que P est dans S
            NombreExemplaire=findstr(P,S);
            
            % stoc les informations quand P est présent en deux exemplaires
            if length(NombreExemplaire)==2
                Exemplaire{iteration+1}.S=S;
                Exemplaire{iteration+1}.Length=length(P);
                Exemplaire{iteration+1}.P=P;
                Exemplaire{iteration+1}.Place=NombreExemplaire;
                break
            end
        end
    end
    iteration=iteration+1;
end

for j=1:iteration
    % recupere les longueurs max de P (fonction de la taille de S)
    MatriceExemplaire(j)=Exemplaire{j}.Length(end);
end
% plot des résultats
figure('Color', 'w');
axes('FontSize', 15)
hold on
plot([10:10:150 200:100:1000],MatriceExemplaire,'-bs','LineWidth',3)
plot([10:10:150 200:100:1000],3.4*log([10:10:150 200:100:1000])...
,'--g','LineWidth',3)
xlabel('Taille de S','FontSize', 15)
ylabel('Taille de P','FontSize', 15)
legend('Données de simulation','Ligne de vie (3.4 log)')
text(500,24,'vie','FontSize', 20)
text(500,18,'non-vie','FontSize', 20)
text(500,9,'non-vie','FontSize', 20)
set(legend,'FontSize', 15)

% plot S (en noir) et les deux exemplaires de P en rouge 
figure('Color', 'w');
axis off
for j=1:15
text(-0.1,1-j/20,[Exemplaire{j}.S(1:Exemplaire{j}.Place(1)) ...
    '\color{red}'...
Exemplaire{j}.S(Exemplaire{j}.Place(1):Exemplaire{j}.Place(1)...
+ Exemplaire{j}.Length(end)-1) '\color{black}'...
Exemplaire{j}.S(Exemplaire{j}.Place(1)+...
Exemplaire{j}.Length(end):Exemplaire{j}.Place(2)) '\color{red}'...
Exemplaire{j}.S(Exemplaire{j}.Place(2):...
Exemplaire{j}.Place(2)+ Exemplaire{j}.Length(end)-1) '\color{black}'...
Exemplaire{j}.S(Exemplaire{j}.Place(2)+...
Exemplaire{j}.Length(end):end)],'FontSize', 12) ;
end
                
            

Remarquez que cette notion d'exemplaire comme caractéristique de vie nécessite absolument la présence de cette "ligne de vie logarithmique". En effet, deux atomes d'hydrogène sont identiques, ils forment deux exemplaires sans pour autant former l'essence même de la vie.

J'ai rajouté le mot "apériodique" pour supprimer les cas du type "diamant". On pourrait imaginer trouver sur Mars des exemplaires de "diamants" représentant une longue séquence de bits. Le tour de passe-passe "apériodique" supprime ce cas de figure car il supprime les exemplaires très longs mais sans contenu en information selon Kolmogorov (facilement compressible par un algorithme). Notez d'ailleurs que les séquences d'ADN ou de protéines des êtres vivants sont bien globalement apériodiques même si il existe des séquences répétées compressibles.

La conjecture des exemplaires se propose donc comme socle théorique de recherche de la vie pour l'exobiologie (ou la Xénobiologie). Ce qu'il faut c'est rechercher deux exemplaires apériodiques de grande taille (en bit) ---molécules ou pas molécules---. Notez que selon ma conjecture, trouver une soupe de molécules complexes mais toutes différentes ne suffit plus. Il faut en trouver au moins 2 identiques.

A partir de là, seule la moitié du travail est faite. Car définir ce qu'est une trace de vie et définir la vie elle-même n'est pas exactement la même chose. Pour franchir cette deuxième étape, il me faut encore m'enfoncer plus en profondeur dans la métaphysique. J'espère que le lecteur positiviste monomaniaque me pardonnera.

Qu'est ce que la vie ?

Le système S est vivant au temps t1 si et seulement si il existe un temps t2 > t1 tel que la somme de l'ensemble des exemplaires Pn appartenant à S au temps t2 est supérieur à cette même somme au temps t1. Pn est une séquence en deux exemplaires tel que taille(Pn)>log(taille(S)) x constante et n est le nombre de séquences P différentes.

Le but de la vie est donc la maximisation de cette somme sur un temps suffisamment long. Et c'est cette maximisation (recherche d'une pente globalement positive sur le long terme) du nombre de types d'exemplaires et du nombre d'exemplaires appartenant à S qui représente la volonté de puissance Nietzschéenne, c'est à dire la vie.

La vie cherche son expansion. Elle "veut" injecter de l'information dans chaque kilomètre cube de planète, dans chaque centimètre cube de terre, dans chaque nanomètre cube d'atomes. Si elle le pouvait, la vie envahirait le centre de la terre ou l'univers. Mais pour l'instant, elle cherche. Injecter de l'information dans les atomes de l'univers, voila son but. Et je soupçonne que cette injection d'information passe inexorablement par la notion d'exemplaires. Se pourrait-il que les concepts d'information, de mémoire et d'exemplaires supérieurs au logarithme soient des concepts indissociables ?

Petite parenthèse d'épistémologie. N'hésitez pas à la sauter. Intuitivement, nous avons le sentiment qu'il y a, au cours de l'histoire, une pente positive dans l'élaboration des connaissances, une sorte de pyramide : on appelle cela le progrès. Or les relativistes extrêmes nient l'existence de ce progrès qui ne serait qu'une vue de l'esprit (attention, il ne s'agit pas ici de morale). Et il me semble qu'en l'état actuel des connaissances, il est impossible de démontrer l'existence du progrès et donc de contredire les relativistes. Or la conjecture des exemplaires, tentative pour définir la vie, peut aussi servir à définir ce qu'inclut la vie, c'est-à-dire le progrès. La maximisation de la somme des exemplaires "d'énoncés informatifs" qui se propagent pourrait servir de socle à la définition du progrès (hors question morale je le répète). Nous aurions donc un point d'accroche pour contre-argumenter face aux relativistes. Fin de la parenthèse.

Pure spéculation sur la question  qu'est ce que la vie ?
Figure 4. Pure spéculation sur la question "qu'est ce que la vie ?"

Je répète que la conjecture ci-dessus est une pure spéculation. Les équations ne sont pas là pour donner "une illusion de science": nous nageons en pleine métaphysique. Je prends volontairement le risque de raconter/de présenter de grosses bêtises pour montrer que justement en métaphysique, le ridicule ne tue pas: je suis à peu prés sûr qu'une personne lisant ces lignes pourrait sans doute, en réfléchissant quelques minutes, présenter de bons arguments à l'encontre de ma conjecture. Ces arguments pourraient me convaincre et me faire rejeter ma propre conjecture. Car c'est la flexibilité de l'opinion et non sa stabilité qui caractérise le fonctionnement scientifique.

Bien que non positiviste, étrangement cependant, ma conjecture métaphysique conserve une certaine faculté de falsifiabilité (selon Popper). En voici la preuve: "Si quelqu'un trouvait un système extraterrestre présentant à l'évidence deux exemplaires identiques de très grandes tailles (en bit) sans que ceux-ci représentent une trace de vie, alors ma conjecture serait fausse". Puis la version opposée, "Si quelqu'un trouvait un système extraterrestre ne présentant pas deux exemplaires identiques de très grandes tailles (en bit) alors même que l'évidence empirique indique la présence d'une vie extraterrestre dans ce système, alors ma conjecture serait fausse". Je ne suis cependant pas naïf et je ne vais pas tenter de faire passer ce pseudo critère de réfutabilité comme une preuve de la scientificité de ma conjecture.

J'ai utilisé l'exemple de Mars comme du système S mais en fait, le système S peut représenter n'importe quoi et donc peut avoir des dimensions beaucoup plus restreintes, des dimensions "expérimentales". Mettez de l'eau dans un tube et c'est votre système S. Peut-on trouver/imaginer deux exemplaires de grandes tailles (en bit) (molécules ou pas, ce qu'on veut !) dans ce tube ? Selon moi non: il n'y a pas de traces de vie dans ce système. Rajouter maintenant une protéine (sans motif répété): Ce système comporte t'il une trace de vie ? Selon ma conjecture: Non. Rajouter maintenant une deuxième protéine identique et alors le système contient une preuve de vie passée. Cette vie passée c'est la vie de l'organisme modèle utilisé qui a été capable de synthétiser ces deux protéines identiques.

La conjecture des exemplaires induit quelques conséquences étranges:

Placez des bactéries dans du glycérol et congelez-les à -80°C. Si après quelques mois, on remet ces bactéries congelées dans du milieu frais, elles "revivent" c'est-à-dire qu'elles se remettent à se diviser. C'est ce que l'on fait tous les jours au laboratoire. Le système Bactéries / glycérol / congélateur contient indéniablement des preuves de vie passée (enzymes identiques, ADN, ARN identiques etc...). Pourtant, selon la conjecture, le système Bactéries / glycérol / congélateur est mort car il n'existe pas de temps t2>t1 tel que ce système contienne plus d'exemplaires qu'au temps t1. Le fait que les bactéries soient ressuscitables ne changent en rien au fait que le système Bactéries/glycérol/congélateur soit mort. Le fait de faire remonter la température et d'ajouter du milieu change le système (injection de calories) qui devient bien vivant car les bactéries ressuscitent mais il n'est en rien comparable au système précédent (sans calorie).

Placez un ordinateur portable sur Mars. Cet ordinateur contient un programme basique capable de manipuler (effacer et créer) des exemplaires (des séquences identiques de grandes tailles en bit). Maintenez la batterie de l'ordinateur en utilisant des cellules photovoltaïques. Votre système Ordinateur--Mars--Soleil vivra quasi éternellement.

Quelques conséquences étranges induites par la conjecture des exemplaires.
Figure 5. Quelques conséquences étranges induites par la conjecture des exemplaires.

La mort

Dans la conjecture des exemplaires, la mort/destruction des organismes/des exemplaires a un intérêt pour l'heuristique qu'est la vie. En effet, pour maximiser le nombre total d'exemplaires, il est nécessaire d'en détruire certains pour récréer du potentiel et chercher une combinaison plus optimale. La vie, volonté de puissance, a choisi de nous faire mourir car sans cela, celle-ci serait bloquée dans un maximum local. Le temps t2 contenant plus d'exemplaires n'existerait plus ce qui signerait, par définition, l'arrêt de mort de la vie. Une idée déjà exprimée par Nietzsche:

"Je veux dire que le fait de devenir partiellement inutile, de dépérir et dégénérer, de perdre sens et utilité, bref de mourir, cela aussi appartient aux conditions d'un progrès véritable: lequel prend toujours forme de volonté et de voie vers plus de puissance et s'accomplit toujours aux dépens d'un grand nombre de puissance mineures."14

En décrivant la conjecture des exemplaires, j'ai utilisé le mot mort mais il aurait mieux valu que j'utilise le mot non-vie ou le mot potentiel. En effet, selon moi, la mort n'est pas l'opposé de la vie. La mort est le mot qui marque la transition de la vie à la non-vie. La mort, chez l'homme, est difficilement dissociable de la peur qu'elle engendre. Cette peur est plus liée à la transition qu'à l'éternité de non-vie qui lui succède. Cette transition implique:

"Ô spectacle de terreur ; mort difforme et affreuse à voir ; horrible à penser et combien horrible à souffrir" 15

Je pense que la peur instinctive d'un corps en décomposition est liée à la présence d'eau. En effet, c'est l'eau qui est un des moteurs de la décomposition (via l'action des micro-organismes). L'évolution nous a sélectionnés pour avoir peur de ces organismes morts mais encore hydratés et donc actifs "calculant !" car la transmission des maladies passe parfois par l'intermédiaire des cadavres. A l'inverse, un corps sans eau (momie déshydratée) ou un animal desséché (par exemple un insecte mort) ne génèrent pas la même anxiété. L'intuition nous fait percevoir le caractère inoffensif de ces cadavres.

Plus généralement, je soupçonne que la peur de la mort soit encodée dans le génome et soit sélectionnée par l'évolution. Petit question d'éthique: si nous détections les gènes/nucléotides responsables de cette peur irrationnelle, devrions-nous les muter pour l'humanité entière? Si non, devrions nous interdire à quelqu'un qui ne souhaite plus avoir peur de la mort de muter les siens?

Cependant, le rapport de l'homme à la mort dépend aussi de sa manière d'envisager le temps. A l'époque où la dérivée positive du progrès n'était pas vraiment visible, le temps avait une apparence plus cyclique. Avec l'alternance des saisons, avec le cycle des générations, l'arrivée de la mort semblait normale, dans la logique de ce temps cyclique, en harmonie avec la nature. A l'inverse, avec le progrès, le développement des sciences, le temps a pris une allure linéaire, croissante. La mort nous apparait comme une erreur à cause de la sensation que le progrès continuera après notre mort. On saute d'un bateau qui continue en ligne droite, sans nous, vers son but. Cette sensation "d'erreur" se surajoute négativement aux effets instinctifs/évolutifs. Nous verrons bien plus tard que paradoxalement ce bateau (la science) avance à la recherche du néant.

Etant donné ce rapport particulier qu'à l'homme à la mort, il lui est très difficile de traiter la mort de manière scientifique et de la loger disons à la même enseigne que la vie. Pour un scientifique comme pour tout le monde d'ailleurs, penser à la mort c'est penser à sa mort et cela engendre des réactions infantiles.

"Toute conscience de la mort, provoque toujours des réactions infantiles, car la mort est la seule chose hors du pouvoir de l'homme, la seule devant laquelle il est impuissant totalement, comme un enfant." 16

La distance positiviste, consistant à cacher autant que possible le scientifique derrière ses observations, est plus difficile à trouver qu'avec tout autre questionnement scientifique y compris la vie. Ainsi la mort a une dimension profondément humaine et c'est sous cet angle là que je souhaite l'aborder. C'est en réalité le seul angle que j'entrevoie car la mort dépossédée de connotation humaine, c'est, je le répète, de la non-vie. Nietzche disait à peu prés l'inverse, mais au final, j'ai l'étrange sentiment que cela revient au même.

"Gardons nous de dire que la mort est le contraire de la vie. Le vivant n'est qu'un genre de mort, et un genre très spécial" 17

La mort selon Google image
Figure 6. La mort selon Google image.

On sait, grâce au psychiatre Elisabeth Kübler-Ross, qu'à l'annonce d'une mort prochaine, l'homme passe par différents stades, de manière cyclique. Ces cycles peuvent se produire à différentes échelles de temps (heures, jours, semaines, mois). J'énumère ces différents stades pour permettre aux lecteurs qui en ignoreraient l'existence de les intégrer dans leur savoir. Cela peut s'avérer utile pour celui qui souhaiterait lutter contre ces états cognitifs standards, cycliques et douloureux qui touchent les patients condamnés. Il s'agit:

Un professeur m'a dit un jour en substance: "l'homme éprouve des difficultés à penser à sa propre mort plus de quelques secondes d'affilée ". J'y ai cru pendant longtemps. Je n'y crois plus. Car l'idée de la mort occupe aussi une place, chez les biens portants, dans l'esprit de bon nombre d'entre nous de manière quotidienne (mais cachée)

"Chacun cache sa mort, l'enferme à double tour" 18

"Silencieuse: elle ronge invisible, secrète, honteuse, la conscience au coeur même de la vie quotidienne. Qui oserait en gémir dans la malédiction commune ?" 19

"On ne philosophe pas pour passer le temps, ni pour se faire valoir, ni pour faire joujou avec les concepts: on philosophe pour sauver sa peau et son âme." 20

S'il est vrai que beaucoup pensent régulièrement à la mort avec angoisse durant leur vie, les choses pourraient être bien pires:

"Et pourtant c'est la mort et le silence de mort qui est l'unique certitude et le lot commun à tous dans cet avenir ! Qu'il est étrange que cette unique certitude et ce lot commun n'aient presque aucun pouvoir sur les hommes et qu'ils soient à mille lieux de se sentir comme une confrérie de la mort !" 21

Etrangement il arrive parfois qu'il y ait un décalage entre la peur de la mort (durant toute sa vie) et l'arrivée de la mort, lors de l'agonie, se passant dans la sérénité:

"C'est, souvent encore en pleine conscience, dès que s'affaiblit le muscle de l'affirmation de soi que l'horreur de la mort se dissipe. D'où le fait que certains hommes, hantés toute leur vie durant par l'idée de la mort, montrent au moment physique de l'agonie un calme qui les stupéfie eux-mêmes. C'est ce que l'on appelle la béatitude des mourants où il semble que l'espèce étende sa patte protectrice sur l'individu agonisant." 22

S'il est vrai que la mort nous fait peur, il faut aussi admettre que cette dernière nous aide à conduire nos vies:

"Comme le signalait Kierkegaard, la mort envisagée dans le sérieux, n'est-elle pas une source d'énergie comme nulle autre ? Ne stimule-elle pas l'action ? Et si la transformation de l'essence de l'agir humain faisait elle perdre à l'esprit sa profondeur ? A l'homme animé de sérieux, la pensée de la mort à venir indique le but à diriger sa course. La mort est un stimulant de la vie et le sérieux comprend que l'idée de la mort représente une invitation à l'action. Ne perdons pas notre temps ?" 23

On peut aussi ressentir, comme Spinoza, le fait que rien ni personne (pas même la mort) ne pourra changer le fait que "nos vies" ont existé, ont été:

"Nous sentons et expérimentons que nous sommes éternels"

"Sagesse du grand homme qui tient la mort à distance en continuant son oeuvre immortelle" 24

Peu de gens, finalement, se demandent ce qu'ils pourraient donner à la vie "en échange". Nietzsche nous dirait qu'il donnerait à la vie "de la volonté de puissance". Car il y a une chose que l'on ne peut pas offrir à la vie, c'est la volonté de vivre.

"Il n'a assurément pas rencontré la vérité celui qui parlait de la "volonté de vie", cette volonté n'existe pas".25

La preuve est dans l'éternel retour:

"Le poids le plus lourd. Et si un jour ou une nuit, un démon se glissait furtivement dans ta plus solitaire solitude et te disait: cette vie telle que tu la vis et l'a vécu, il te faudra la vivre encore une fois et encore d'innombrables fois ; et elle ne comportera rien de nouveau, au contraire, chaque douleur et chaque plaisir et chaque pensée et soupir et tout ce qu' y a dans ta vie d'indiciblement petit et grand doit pour toi revenir, et tout suivant la même succession et le même enchainement" 26

Qui souhaiterait un tel éternel recommencement de la vie ? Personne. C'est bien là une preuve que nous ne sommes pas tant attachés à la vie en elle-même mais plutôt à la volonté de puissance qu'elle rend possible. En fait, Nietzsche pense qu'idéalement, il faudrait pouvoir mener chaque seconde de sa vie de manière à pouvoir souhaiter que ces secondes se répètent dans un cycle infini. Or justement, pour pouvoir souhaiter cela, il faut avoir cherché à gagner en puissance toute sa vie. Posons-nous une question simple ? Voudrions-nous vivre éternellement la vie d'un bovin? Une vache dans un champ nous semble avoir une volonté de puissance trop faible et nous méprisons une telle vie, fade et sans intérêt. La vie d'un bovin nous semble plus proche de la mort que de notre vie propre.

Pour résumer, quand on voit que:

On peut donc bien considérer que, après tout, comme disait Platon:

" La mort est un beau risque à courir".

Notes de bas de page

  1. Carl Sagan,Definitions of life.
  2. Edouard Machery, Why I Stopped Worrying About the Definition of Life... And Why You Should as Well, 2010.
  3. Michel Morange, La vie expliquée, Odile Jacob p.180
  4. J'ai un peu honte de ne pas être en mesure d'associer chaque auteur à chaque vue. Voici quelques noms qui me viennent à l'esprit: Edgar Morin, Michel Morange, François Jacob, Jacques Monod, Georges Canguilhem, Antoine Danchin, Bichat, Aristote, Bernd-Olaf Küppers, M. Perret, Stuart Kauffman, Humberto Maturana, Francisco Varela, Ali Saïb, Haeckel, Nietzsche, Barbara Stiegler et Wikipedia.
  5. Jacques Monod, Le hasard et la nécessité, Points p.37--38.
  6. Ainsi parlait Zarathoustra/Deuxième partie/De la victoire sur soi-même.
  7. Nietzsche, Par delà bien et mal, Folio p. 182.
  8. Nietzsche, Le gai savoir, Flammarion p. 336.
  9. Michel Morange, Les secrets du vivant, La découverte p. 230.
  10. Michel Morange, Les secrets du vivant, La découverte p. 142.
  11. Cette idée n'est pas nouvelle. Elle était déjà connue (ou proposée ?) par Ernst Haeckel il y a plus d'un siècle.
  12. Je n'en suis pas sûr: ma source est encore l'article de Mars sur Wikipedia.
  13. René Thom, Prédire n'est pas expliquer, Champs p. 67.
  14. Nietzsche, La généalogie de la morale, Folio p. 86
  15. Edgar Morin, L'homme et la mort, Points p. 43.
  16. Edgar Morin, L'homme et la mort, Points p. 185.
  17. Nietzsche, Le gai savoir, Flammarion p. 163.
  18. Edgar Morin, L'homme et la mort, Points p. 43.
  19. Edgar Morin, L'homme et la mort, Points p. 43.
  20. André Comte-Sponville, Présentation de la philosophie, le livre de poche p. 151.
  21. Nietzsche, Le gai savoir, Flammarion p. 228.
  22. Edgar Morin, L'homme et la mort, Points p. 49.
  23. Jacqueline Russ, La pensée éthique contemporaine, PUF p. 33.
  24. Edgar Morin, L'homme et la mort, Points p. 63.
  25. Nietzsche,Ainsi parlait Zarathoustra/Deuxième partie/De la victoire sur soi-même.
  26. Nietzsche, Le gai savoir, Flammarion p. 279.